Déjà
le deux janvier ! Les Rois enrubannés
Vont se tirer bientôt, généreux
en couronnes ;
L’onctueuse galette ou ses succédanés
Rempliront l’estomac d’hydrates
de carbone
Truffés de frangipane ou
de fruste compote,
Enrobant de miellat la fève
égalitaire
Accessible au palais du plus humble
des potes
Et propice aux santés où
la nôtre s’altère.
Allons-y pour les vœux, les présents,
les étrennes,
Le bonheur dans le pré,
les mots, l’encens, la myrrhe,
Et l’ivresse des temps où
s’exhale sereine
La sagesse du mage ou de l’homme
de Myre.
En guise de cadeaux, le grand saint
Nicolas,
Par sa hotte éreinté
depuis le six décembre,
Trimballe de Lycie dont il fut
le prélat
Un gel roboratif à base
de gingembre.
On le sait protecteur des enfants,
des marins,
Apaisant la tempête et sauvant
du saloir
Les trois petits lardons que quelque
mandarin
S’apprêtait à croquer
au fond de son boudoir.
Mais parmi ses vertus, l’éminent
thaumaturge,
Si prodigue en jouets quand les
gens les financent,
A le secret pouvoir de trouver
quand ça urge
Tous les objets perdus par vol
ou par malchance.
Je l’ai donc imploré d’abolir
la misère,
De chercher liberté, travail,
amour, reprise,
Et de rendre leur dû à
ceux qui désespèrent ;
De marbre il est resté dans
un coin de l’église.
Délaissant Nicolas pour
le sacré sapin
De fibre synthétique et
bariolé d’étoiles,
J’ai contemplé le verre
à l’alcool cristallin,
Embrumant mon désir d’un
mirifique voile.
Restait le réveillon, restait
la Saint-Sylvestre,
La nuit pétaradante où
l’année qui bascule
Engendre les bisous, dextro comme
à senestre ;
J’ai donc fraternisé sans
le moindre scrupule.
Mais Sylvestre est de bois, son
nom nous le rappelle ;
Il nous donne la gueule et la langue
de bois,
Le tronc creux des discours et
la bûche à la pelle,
Les réveils douloureux et
la bourse aux abois.
Vous êtes comme moi et je
suis comme vous ;
Je veux votre bonheur et vous voulez
le mien.
J’ai le péché mignon,
c’est un fait, je l’avoue,
De croire qu’un sourire éclairera
demain.
Quand un cœur se rapproche et que
vient le regard
Où se nouent les vœux purs
dans une épiphanie,
Alors peut apparaître à
l’Orient blafard
Le rameau d’olivier de nos mains
réunies.