le 29/05/2009 - JP BOCQUET
Au fil des jours…
 
 






Vendredi 29 mai. J’ai des coquelicots plein les yeux ; j’ai des coquelicots plein la tête. Fin avril, la crête rouge vif de ces pavots communs parsemait déjà les fossés et les talus méridionaux, mais fin mai, c’est l’invasion généralisée : des champs entiers de coquelicots noient les blés encore verts, des pédoncules téméraires se risquent même dans les interstices des bordures de trottoirs… Le virginal muguet du Maréchal connaît la ménopause – à Montoire comme ailleurs -, les lilas s’oxydent et se fanent, les roses restent incertaines mais les coquelicots triomphent en ce mois de Marie.
Il faut traverser les hauteurs arides et rocailleuses de la Lozère et du Larzac en mai, là où l’herbe éparse et malingre s’accroche comme elle peut, pour s’étonner de la vivacité des coquelicots qui grêlent le sol de leurs points rouges en un gigantesque érythème solaire…
C’est que le coquelicot est la fleur « gauloise » par excellence. On l’aurait ainsi dénommée à cause de sa couleur et de sa forme qui rappellent la crête du coq, appliquant à la fleur l’onomatopée qui imite le chant de ce volatile si familier de nos stades et de nos écussons sportifs. Cocorico, coquelicot, coquelicoq à l’occasion, telle est la filiation et le fruit de l’imagination populaire.
Inutile de s’appesantir sur la symbolique du coq. Il est « gaulois » parce que les Romains l’ont voulu ainsi, par assimilation du nom de l’animal mâle « gallus » (la femelle étant « gallina ») et de « Gallus », le Gaulois. Comme quoi les mots nous jouent parfois des tours et nous font une réputation pour le moins discutable. Si je cédais à la trivialité et à la gauloiserie, j’y verrais le signe que les Français sont de bons petits coqs et que les Françaises sont autant de poules (superbes ?)… Mais je ne céderai pas à cette tentation. Depuis que j’ai lu Voltaire, je sais que le poulailler est le gouvernement monarchique par excellence car le coq va toujours le premier à la bataille, est toujours en première ligne (Ah ! si ça pouvait être le cas de nos hommes politiques…).
Je reviens à nos coquelicots, fleurs aussi rouges que nos désirs, nos émotions, nos violences et nos amours, fleurs solaires à l’instar du réveille-matin des ancestrales basses-cours, frêles pédoncules surmontés de leur arrogante fierté.
Fleurs opiniâtres et sauvages. Fleurs impressionnistes. Ce que j’aime surtout dans ces fleurs, c’est le soyeux et la fragilité des pétales qui se flétrissent sous le doigt qui les caresse et qui les roule en quête d’un improbable secret…
En somme, provocants et intouchables, si téméraires et si mortels, les coquelicots sont à l’image de la vie… Laissons-les au plaisir des yeux…

Valeurs 01/05/09
Barbare 05/05/2009
Résistance 08/05/2009
Epanchements 27/05/09
Coquelicots 29/05/09
 Recyclage 30/05/09
 
 
 
 
   
 
   

 
 
 

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Jean-Pierre BOCQUET
Professeur de Lettres retraité
Conseiller municipal
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