le 1/032011 - JP BOCQUET
Au fil des jours…



 
 
 
 
 

 
 Mardi 1er mars 2011. La toiture de ma demeure est entre les mains de couvreurs. Elle avait besoin d’un toilettage, d’une sorte de remaniement : brossage pour enlever les lichens, rejointoiement des faîtières, étanchéité du pourtour de la cheminée, remplacement de quelques tuiles en déroute… Je m’adonnerai demain à ce qui m’occupait hier sous un toit identique, à quelques apparences près. Ainsi va la France depuis des mois…
Car enfin, de prothèse en prothèse et de béquille en béquille, de besicles en lorgnon et de remaniement en remaniement, c’est toujours le même Président, les mêmes obsessions, les mêmes lubies.
Au fait, remaniement ou reMAM(i)ement ? ReMAM(i)ement bien sûr ! MAM a menti, menti par falsification puis par omission, menti sur les modalités de son amour secret pour la Tunisie. Rendez-vous compte : la survoler à plusieurs reprises aux frais d’un proche de Ben Ali, y trouver un petit pied-à-terre que ses vieux parents pourraient acheter comme un coin de paradis, avoir une escouade de conseillers rémunérés avec nos impôts pour prendre la température du monde et ne rien voir venir, comme sœur Anne, quelle impardonnable impéritie !
Alors, il fallait bien rejointoyer, expliquer à nos chers compatriotes qui attendaient avec l’impatience que l’on imagine cette explication de texte, que le mot « remaniement », n’a aucun rapport avec le verbe mentir ni encore moins avec les atermoiements de MAM. On a viré Kouchner parce qu’il devenait trop étranger au sens des affaires et parfois tenaillé par le remords, et l’on vire maintenant MAM pour ses malencontreux survols. Et l’on s’empresse de raboter, le temps d’une allocution officielle du dimanche soir, l’encombrant jambage de trop d’un « m » qui illustre comme un malaise, un symptôme récurrent, le syndrome d’une présidence illégitime.
Avoir été élu avec 53% des voix lors d’une participation record de 86% de l’électorat n’autorisait vraiment pas à faire n’importe quoi. Ce que l’on fait hélas de plus en plus à mesure que s’égrènent les mois et les semaines.
Quel est en effet l’esprit de la Constitution de la Vème République et de son régime présidentiel, que l’on soit pour ou contre ? C’est la rencontre d’un homme et d’un peuple dans l’élection d’un président au suffrage universel direct. C’est de là que le Président tire sa force, son autorité et sa légitimité. Mais c’est aussi ce qui l’oblige à prendre en considération les aspirations de tous les Français, quels qu’ils soient et quels qu’aient été leurs votes lors de cette élection. L’ouverture politique –qui est toujours souhaitable – ne doit donc pas se limiter à quelques nominations ministérielles (surtout si elles sont destinées à de la figuration) mais viser à privilégier le bonheur de tous et de chacun sur les intérêts clientélistes. En somme, et paradoxalement, l’esprit de la Constitution de la Vème République est mendésiste, même si la lettre ne l’est pas.
Force est de constater qu’en matière de politique internationale, et assez continûment d’ailleurs au-delà des alternances politiques, De Gaulle, Mitterrand et Chirac ont souvent su porter haut et loin ces valeurs qui font le ciment de la France depuis 1789. Ce fut sans doute moins vrai du temps de Giscard, ce l’est encore moins aujourd’hui.
Rappelons-nous Michel Jobert (Jobert d’Arabie comme le baptisait à l’époque le périodique Jeune Afrique). Il n’était guère plus grand que notre actuel Président, mais il n’avait pas besoin de talonnettes pour faire entendre un son de cloche autre que celui d’Henri Kissinger. Rappelons-nous Claude Cheysson, Hubert Védrine et pourquoi pas Dominique de Villepin: l’Histoire retiendra d’eux autre chose qu’une vision « coloniale » de l’Afrique.
Que Brice Hortefeux soit passé à la trappe dans cette affaire, tant mieux. Mais à force d’en faire passer à la trappe mois après mois pour mieux se dédouaner (c’est jamais lui, c’est les autres), Nicolas Sarkozy va bientôt se retrouver seul, comme le père Ubu. En attendant, il joue les mauvais élèves qui, pris la main dans le sac, viennent clamer « c’est pas moi » ou encore « les autres aussi, les autres aussi », comme si c’était une excuse…
Son reMAM(i)ement n’a en fait qu’une finalité : préparer l’élection présidentielle de l’an prochain. D’où Claude Guéant à l’Intérieur, d’où Alain Juppé aux Affaires Étrangères pour « emmerder » Alain Juppé. Dans la logique de la Vème République, le Premier ministre, nommé par le Président, n’est que le moyen du pouvoir exécutif. Il « dirige l’action du Gouvernement » (art. 21), et le Gouvernement « est responsable devant le Parlement » (art. 20). Bref, Matignon n’est que le siège du pouvoir immédiat et le Premier ministre l’avancée et le truchement du Président vers le Parlement. L’autre rôle du Premier ministre est d’être le parapluie et le fusible du Président. Il n’est donc pas possible qu’il y ait deux reines dans la ruche, c’est un non-sens. Chaque fois qu’un Premier ministre a cru pouvoir profiter de sa notoriété pour se positionner et rêver d’être le calife à la place du calife, il en a fait les frais : qu’on songe à Pompidou, Chaban, Rocard… Aujourd’hui, l’unique souci du Président est d’instiller la zizanie à l’intérieur de son équipe pour mieux neutraliser ses éventuels concurrents. Juppé contre Fillon, Juppé contre Coppé et Fillon, MAM à la trappe au cas où, etc., etc. Il ne pense qu’à cela et nous agite à nouveau les peurs de l’immigration massive et du terrorisme. Et bientôt, l’on dira de Juppé : « Mais que diable allait-il faire dans cette galère ? » Colmater ? Même pas. Le courrier de sa mission est cacheté, mais il est vide. C’est bien là le triste secret des semaines à venir…
Et voici que vient de mourir Annie Girardot. Que les gesticulations politico-médiatiques du moment nous paraissent dérisoires au regard de ce que fut cette actrice ! Elle ne s’est pas contentée d’être une promesse le temps d’un printemps… Et cette saltimbanque aura finalement davantage contribué au bien de la cité que certains politiques qui jouent aux saltimbanques.
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Jean-Pierre BOCQUET
Professeur de Lettres retraité
Conseiller municipal
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