le 13/032011 - JP BOCQUET |
Au fil des jours…
Dimanche 13 mars 2011. Carême.
Début d’une quarantaine d’abstinence et de pénitence ? Au
cours actuel du poisson et de l’eau ? Il fut un temps où le cercle
restreint des catholiques fortunés s’accommodait à bon compte
de cette pratique en sacrifiant à la lotte ou au turbot par exemple…
Mais le jeûne a-t-il encore un sens pour tous les damnés de
la crise que la précarité précipite aux Restos du
cœur ? Et peut-être qu’un État développé, laïque
et républicain ne devrait pas seulement se soucier des interdictions
alimentaires des élèves qui ont accès aux cantines
scolaires, mais aussi de garantir le pain quotidien à tous les enfants
vivant sur son sol.
Pendant ce temps, on attise les
peurs, celles du terrorisme et de l’immigration massive. On stigmatise
et l’on ravive la xénophobie, avec les résultats que l’on
sait. Pendant ce temps, malgré quelques avertissements de principe
au délirant Khadafi, l’Europe s’enlise dans des atermoiements, remettant
sans cesse à demain ce qu’elle pourrait faire le jour même.
Nicolas propose mais Angela rechigne. Le nombre de morts libyens augmente
parallèlement au prix des carburants à la pompe. Les experts
nous ressassent le lien entre les deux phénomènes : la révolution
des uns serait néfaste au porte-monnaie des autres. De là
à croire que l’on aurait intérêt aux dictatures, il
n’y a parfois qu’un pas… Et l’on sait bien que dès que l’on agite
la peur du manque à gagner, des esprits dociles et de bonne foi
sont prêts à emboiter le pas.
Les jours à venir n’amorcent
pas seulement le Carême, mais encore le Printemps des poètes.
Comme d’autres, je m’essaierai à jongler avec les mots, me risquant
aux rimes et aux figures, attentif à la montée de la sève
et riant malgré les averses. Après tout, même si elle
ne vise qu’un « aboli bibelot d’inanité sonore », la
langue poétique vaut mille fois mieux que la langue de bois qu’on
nous assène à longueur d’année. Et qu’on l’élève
aux prémices du Renouveau pour redonner « un sens plus pur
aux mots de la tribu », pourquoi pas ? Il restera 51 semaines à
ceux que ça dérange pour galvauder et avilir les mots en
question. Il me suffira d’ailleurs de voir nos leaders politiques s’invectiver
sur les plateaux de télévision à l’issue des Cantonales
pour me dire que le verbe galvauder est plus que jamais d’actualité,
dans toutes ses acceptions, ce verbe qui est lui-même le rapiéçage
de « galer » et « ravauder ». Mais, comme ils ne
savent pas ce qu’ils font, je leur pardonnerais volontiers à la
condition expresse qu’ils ne nous crucifient pas à terme, ce dont
je ne suis pas si sûr. Il leur faut fatalement des coupables quand
ils ne peuvent plus masquer l’évidence de leurs échecs par
des pantalonnades. Heureux poètes ! Heureux Brassens et La Fontaine
qui savaient « galer » avec à propos tandis que nos
politiques galvaudent sans le savoir comme Monsieur Jourdain faisait de
la prose.
Le Printemps des poètes
s’est choisi comme thèmes cette année « Infinis paysages
». C’est tout un programme. Le séisme et le tsunami sans précédents
qui viennent de dévaster le Japon, semant la mort et la désolation,
nous rappellent hélas que la nature n’est pas – loin s’en faut –
la mère douce et enchanteresse si souvent peinte. En percer les
mystères et mieux la connaître, ce n’est pas forcément
la domestiquer. Multiplier les enceintes pour nous protéger tous
azimuts des monstres gigantesques ou microscopiques qu’elle engendre, n’empêchera
guère les forces à l’œuvre. Cela en limitera par contre,
et c’est le plus important, les effets dévastateurs.
En tout cas, voilà l’homme
une fois encore ramené à sa juste dimension. Puisse cette
leçon de choses être parallèlement une leçon
politique et un rappel évident à la grande loi de solidarité
humaine. À supposer que le péché existe, le seul qui
soit irrémissible, c’est le refus de la loi de solidarité.
En France et dans le Monde, en Libye comme au Japon.
Infini paysage : ligne d’horizon
béante sur l’avenir et l’inconnu ; clé du mystère
dans l’invisible métissage ; appel à la libération
par les mots dans la solidarité des regards. Printemps de paix pour
les hommes de bonne volonté…
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au fil des jours
Jean-Pierre
BOCQUET
Professeur
de Lettres retraité
Conseiller
municipal
13
allée des églantiers 59229 TETEGHEM
jpbocquet@aliceadsl.fr
Tel:
03 28 26 17 23 - Portable : 06 22 15 88 96
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