le 29/01/2010 - JP BOCQUET
Au fil des jours…













          Vendredi 29 janvier. C’est reparti ! L’encombrant président de la fœtale Septimanie aurait encore dérapé.
Après ses propos racistes sur les Harkis et les footballeurs de l’équipe de France, voici qu’il s’en prend à Laurent Fabius, raillant les origines juives de ce dernier. Georges Frêche affiche ainsi une bien curieuse conception de l’identité nationale, ce qui prouve –soit dit en passant – que ses alliés politiques (à défaut d’être ses amis politiques ?) eussent été bien inspirés de participer à un débat qu’ils boycottent : au moins auraient-ils pu utilement rappeler que notre République est une terre de métissage et d’intégration, qu’elle laisse chacun de ses citoyens libre de croire ou de ne pas croire, qu’elle ne lie pas la nationalité de ses ressortissants à une couleur de peau, une religion privilégiée ni un statut historique. Au lieu de fustiger Éric Besson avec des méthodes et des slogans pas très éloignés des slogans et des méthodes de ceux qui brûlaient les livres sur les places publiques, ils auraient ainsi condamné par avance les dérives intellectuelles et morales de leur silo à voix. Car le problème est là pour nos chevaliers blancs : comment ne pas se priver des voix de dizaines de milliers qui votent Frêche ? Créon ou Antigone ? Les valeurs ou le pouvoir ? La probité ou les mains sales ? Telles sont les alternatives auxquelles ils voudraient échapper…
En attendant, Éric Besson a consigné dans un ouvrage qu’ils auraient pu signer mais qu’ils feignent d’ignorer et passent sous silence, ce qu’ils devaient prendre à leur compte et qui eût été à leur honneur.
Vous me direz que les mots ne sont pas les actes et j’en conviens aisément. Et d’ailleurs, les mots ne sont rien, seules comptent leurs significations. Éric Besson fait de la politique. Il sait sciemment qu’on en fait pour agir ou témoigner, par ambition et goût du pouvoir, par narcissisme, par plan de carrière et sens des affaires, etc. Il sait donc que dans ce monde féroce où il y a beaucoup d’appelés et moins d’élus, les luttes fratricides font rage et que choisissant le parcours qu’il a choisi, il endossait forcément la panoplie du bouc émissaire.
Au fond, la politique politicienne (puisque la vraie – qu’on ne voit plus guère – c’est l’art et seulement l’art de gouverner la cité) est à l’inverse de cette volonté de vivre ensemble qui fonde la citoyenneté et définit le mieux l’identité française. Comme l’écrit Saint-Exupéry, « Si tu diffères de moi, loin de me léser tu m’augmentes. »
Laissons nos politiciens à leurs parties de chaises musicales : elles ne mériteraient même pas un commentaire dans la presse ! Le plus grave pour notre démocratie est ailleurs. Il est dans la disparition de l’esprit critique et de la liberté de conscience.
Revenons en effet à notre patelin Georges Frêche qui exhibe un ouvrage de Claude Duneton et se retranche derrière l’autorité linguistique de ce spécialiste des expressions françaises. En réalité il sait bien qu’il excite le « refoulé » de ses électeurs quand il profère ce qu’il profère. Il sait bien qu’il engrange des voix. Il sait bien qu’en temps de crise de tels propos sont porteurs par leurs connotations latentes. Il le sait ! Mais, hypocritement, il rappelle que les mots n’ont que le sens qu’on leur prête et que donc il n’a pas dit ce qu’il a dit. Ah ! le fin lettré…
En ces temps de Carnaval j’imagine un instant Georges Frêche condamné à connaître la misère sociale, les sifflets et les injures, la misère des camps et la tristement célèbre charrette d’infamie médiévale ; je l’imagine dans les trains de la mort, marqué du sceau de Salomon ; je l’imagine à Auschwitz, privé des ouvrages de Duneton et soumis à quelques inscriptions cyniques ; je l’imagine aphone. Il comprendrait peut-être qu’on ne peut pas tout réduire à de la mascarade.
Les sociologues et les psychologues nous expliquent à l’envi la violence par l’absence de maîtrise du langage. Sans les mots pour le dire, ce sont les coups qui triomphent. On doit alors déplorer que ceux qui maîtrisent les mots les manipulent pour inciter à la violence.
J’invite donc Georges Frêche, président de la région Languedoc-Roussillon et grand consommateur de Claude Duneton, à prendre en considération la variante « aller de conserve » pour « aller de concert » qu’on trouve dans les expressions retenues par cet auteur. Cela lui mettra la puce à l’oreille, l’incitera à l’harmonie et l’inclinera à ces conserves sétoises qui font le bonheur des touristes et des vacanciers. Qu’il aille donc déguster une bonne brandade de morue ou des bouquets autres que celui du titre de l’ouvrage qu’il arbore comme la bible du bon pénitent.  Car, en attendant, et même s’il escompte la relaxe des tribunaux des hommes pour ses insanités, le tribunal d’un autre Georges (Brassens, bien entendu, poétiquement endormi au cimetière marin de Sète pour les siècles des siècles) le relègue déjà dans ce royaume dont il deviendra sûrement le roi indétrônable…
Espérons simplement que la Madone implore pardon pour lui !
 
 
 
 
 
 
 
 
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Jean-Pierre BOCQUET
Professeur de Lettres retraité
Conseiller municipal
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