le 29/04/2011 - JP BOCQUET |
Au fil des jours…
Vendredi 29 avril 2011. Sinistre
fin de mois malgré l’intermède émerveillé d’une
escapade pascale à Paris sous une température presque caniculaire.
Paris grouillant de touristes, regorgeant de consommateurs aux terrasses,
de badauds le long des quais, d’accros des lieux d’art… Paris qui voulait
sans doute accueillir les jeunes clandestins tunisiens (bien discrets à
vrai dire) sans choc thermique…
J’en avais presque oublié
l’horrible tuerie de Nantes et sa macabre orchestration. Les détails
de cette affaire m’ont hélas confirmé dans l’idée
qu’il n’y a pas de limites à l’inventivité humaine, dans
le mal plus souvent que dans le bien.
Depuis, chaque jour que Dieu fait
m’a apporté son lot de victimes. 7 morts dans un accident sur l’A10,
plus de 220 morts dans des tornades dévastatrices aux USA, 15 morts
à Marrakech dans un attentat.
Je connais un peu le Maroc, ce
creuset et ce carrefour d’influences, cette terre de contrastes et d’envoûtante
beauté, si accueillante et tolérante, son peuple patient
et courageux. Je connais un peu Marrakech et sa Koutoubia, je connais un
peu cette ville dont les ruines rappellent les luttes ancestrales pour
le pouvoir. « Marrakch’ il est beau mais il est chaud » me
prévenait à l’époque Ada, parce que je voulais visiter
cette ville et sa palmeraie en plein mois d’août.
Si ce point de rencontre des Européens
riches et avertis vient de subir la loi des attentats, ce n’est donc pas
un hasard. Pour jouir de l’été au printemps et se goinfrer
de dépaysement tout en ne renonçant pas à leur culte
du confort, ils hantent Marrakech en avril. Quelle est en effet la logique
du terrorisme si ce n’est de provoquer la terreur, de provoquer la peur
panique de la population, de la couper de ses dirigeants par le doute et
la méfiance, d’instiller la colère et la révolte,
bref d’instiller les germes d’une révolution future … Et ici, en
outre, de précipiter un pays qui vit du tourisme dans un certain
marasme économique. Inutile de sortir de la cuisse de Jupiter pour
comprendre cette logique. Nul doute que nos démagogues de service
s’empareront de ce tragique événement pour exacerber les
passions xénophobes et la phobie de l’Islam ; c’est du pain bénit
pour eux. Sauf que le barbare ce n’est pas toujours celui que l’on pointe
et que l’on met à l’index, c’est bien plutôt celui qui refuse
de reconnaître la part de barbarie qui sommeille en lui.
J’en viens au kamikaze. Que n’a-t-il
lu le Dictionnaire philosophique portatif de Voltaire ? Voltaire
il est vrai n’a jamais rien compris à la foi, mais il s’est savamment
appliqué à nous désabuser des croyances et des superstitions
dans tous les domaines, nous qui sommes si enclins à la crédulité.
Notre kamikaze aurait ainsi pu
lire dans l’article des Lois, que le meilleur des chefs, c’est le coq.
Et pourquoi ? Tout simplement, parce qu’il « ne donne point d’ordre
à ses sujets d’aller se faire tuer pour lui en vertu de sa certaine
science et pleine puissance ; il y va lui-même, range ses poules
derrière lui, et combat jusqu’à la mort ».
Mille fois hélas, «
les fripons qui conduisent les fanatiques, et qui mettent le poignard entre
leurs mains » (article Fanatisme) n’ont même pas l’éthique
du poulailler, seule l’odeur du fumier leur est familière.
Aujourd’hui, le kamikaze partage
le sort des autres victimes, cadavre lardé de clous et promis à
la décomposition comme les autres, bien loin du ciel qu’il croyait
mériter en obéissant à la loi de l’enthousiasme frénétique…
et le fripon qui a armé son bras se délecte des fruits de
notre terre.
Je pense comme Voltaire que «
lorsqu’une fois le fanatisme a gangrené un cerveau, la maladie est
presque incurable ». Je pense aussi, pour avoir quelque peu fréquenté
les Marocains, qu’ils ont suffisamment de courage et de sagesse pour ne
pas céder aux affres du fanatisme.
Quant à nous, ayons l’humilité
de cesser de nous prendre pour les meilleurs, de juger de tout et de tous
de manière expéditive et définitive, comme si nous
étions les élus et les autres le rebut. Comme disait l’autre,
les leçons ne se donnent pas, elles se prennent. Eh bien ! du temps
pascal qui s’évanouit, prenons cette leçon d’Amour et de
Lumière à partager entre tous les hommes, et de cette Fête
du Travail qui se profile – si typiquement républicaine -, glanons
l’épure si souhaitable d’un monde à bâtir les uns avec
les autres et non plus les uns contre les autres.
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au fil des jours
Jean-Pierre
BOCQUET
Professeur
de Lettres retraité
Conseiller
municipal
13
allée des églantiers 59229 TETEGHEM
jpbocquet@aliceadsl.fr
Tel:
03 28 26 17 23 - Portable : 06 22 15 88 96
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