le 09/02/2010 - JP BOCQUET
Au fil des jours…















          Mardi 9 février. Les formations politiques s’excitent tous azimuts. C’est que l’échéance des Régionales se profile, dispensatrice de places, de pouvoirs et de rapports de force à renouveler. Derrière les remparts des programmes et des slogans, les ambitieux ferraillent ferme, lots de promesses sur la poitrine et tous adeptes de la religion du Dire.
Voleurs de voix comme il est des voleurs d’enfants (cf. la version soft de Supervielle ou la version hard ces temps derniers à Haïti), ils donnent désormais à l’envi dans la « com ». Il fut un temps où il seyait d’avoir un chômeur sur les listes. Ça dénotait un louable souci de lutter contre la fracture sociale… tout en ne pérennisant ensuite que les emplois de sa garde rapprochée. Puis vint le coup de la parité. Et chacun de crier à la cantonade : « Des femmes ! Des femmes ! Des femmes !... » Rien que des femmes… Des femmes pour toi ; des femmes pour vous dans les conseils municipaux ; des femmes pour tous… sauf pour bibi. Parce que bibi est bien sûr incontournable, irremplaçable, si compétent et si providentiel !... Et c’est comme ça que nos assemblées départementales, régionales, nationale et sénatoriale ont une écrasante majorité de bibis et une minorité surveillée de babettes. Oh ! certaines rêvent de guerroyer, ont beaucoup d’ambition et d’orgueil, la férocité et le goût immodéré du pouvoir chevillés au corps. Certaines transgressent l’ordre tacite. Je crains fort cependant que l’atavique fraternité des mâles ne leur accorde pas davantage de liberté que celle que l’on accorde aux foules en délire ou en liesse le temps de l’inversion du carnaval. Les saturnales, ça ne date pas d’hier n’est-ce pas ?
Le dernier truc à la mode, c’est le coup des candidats de la diversité. Tous les partis nous en rebattent les oreilles. Tantôt l’on se vante d’un meilleur pourcentage que le voisin, allant généreusement jusqu’à 10%. Tantôt, au nom de la diversité, on nous refait le coup de la femme voilée comme l’on faisait autrefois le coup de la femme à barbe dans les baraques foraines. Les plus subtils voudraient exhiber telle ou telle origine ethnique ici, la cacher là, bref moissonner large tout en laissant chacun voir midi à sa porte. Il en est même qui prétendent abhorrer l’expression « candidats de la diversité » tout en s’empressant de la resservir à toutes les sauces. Tout cela sent trop la tambouille et les quotas agricoles…
Car enfin, à supposer qu’il existe des candidats de la diversité, que sont les autres candidats ? De l’unicité ? C’est-à-dire de l’origine immémoriale et de pure souche ? Je pressens le retour du refoulé et le racisme latent dans cette affaire. Ou alors, faut-il imaginer que ceux qui présentent les autres comme des candidats de la diversité ne sont que des zombies ? On a fermé la porte depuis des mois au fameux débat sur l’identité nationale  parce qu’on flairait l’électoralisme et certains dérapages et voici qu’il nous revient par la fenêtre avec les Régionales dans l’assentiment général et le consensus politicien. C’est à la fois choquant, burlesque et tellement simple à comprendre…
Comme si chaque être humain n’était pas candidat à la diversité – et sans doute issu d’une inextricable diversité – de par son existence même. Je m’autorise ici des plus grands. Montaigne par exemple, qui affirme : « Je suis un être ondoyant et divers. » Ou encore La Fontaine qui proclame : « Diversité, c’est ma devise. » et qui ajoute :
« Je suis chose légère et vole à tout sujet,
Je vais de fleur en fleur et d’objet en objet. »
Comme si chacun de nous ne butinait pas la vie, fleur après fleur, avec ses peines et ses douleurs, ses joies et ses inattendus, tissé de métissages, se métissant au fil des jours de tout ce qui l’ouvre à l’universel dans l’ouvrage sans cesse poli et repoli de sa singularité.
C’est ce miel commun qui nous augmente de nos différences dans l’aventure solidaire d’un monde à construire. Et c’est bien parce que nous sommes tous, inévitablement et tant mieux, ondoyants et divers que la devise républicaine Liberté-Égalité-Fraternité prend tout son sens. Est-il besoin de rajouter que le terme Laïcité la corrobore ? Pour qui veut bien analyser notre devise, il en est la quintessence… Mais il n’en demeure pas moins que ceux qui pensent que les candidats de la diversité ce sont les autres feraient bien de commencer par revisiter notre devise et la chambre royale de la liberté absolue de conscience plutôt que de se contenter d’emmieller leurs discours.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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Jean-Pierre BOCQUET
Professeur de Lettres retraité
Conseiller municipal
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